Amour et algorithmes sexistes
A l’ère du tout au numérique, nous nous reposons sur les algorithmes pour faire de nouvelles rencontres et peut-être trouver l’amour ! Meetic, Tinder, Happn, autant d’applications qui nous invitent à rentrer en contact avec des personnes qui sont susceptibles de susciter notre intérêt, mais comment ça fonctionne ?
Judith Deportail est une journaliste indépendante s’étant inscrite sur la plateforme Tinder en 2014, et ce pour son propre loisir. Elle a reconnu avoir développé une addiction pour la plateforme jusqu’au jour où elle a découvert que chaque utilisateur·rice se voyait attribuer une note secrète de « désirabilité », un Elo Score, par l’algorithme de Tinder. Judith Deportail a décidé de se mettre en recherche de cette cote ainsi que de partager son expérience lors de conférences.
Les utilisateur·rice·s n’ont en aucun cas accès à ce score (qui pourrait les vexer), mais il est utilisé par l’algorithme pour décider des personnes qui leur seront proposées. En effet, si quelqu’un de très désirable like votre profil, votre cote montera, à l’inverse, si quelqu’un de peu désirable vous like, votre cote baisse.
Cependant, le système de matching est très sophistiqué, chaque personne est évaluée sur son physique mais également sur son intelligence. En effet, Tinder se base sur les conversations privées sur l’application pour déterminer le niveau d’éducation, les diplômes et la richesse des utilisateur·rice·s.
De plus, Tinder se réserve la possibilité d’évaluer les hommes et les femmes de façon différente : un homme qui a fait de belles études et qui gagne bien sa via aura des points bonus. En revanche, une femme qui répond aux mêmes critères recevra des points malus. Par ces critères, Tinder estime que l’homme doit avoir le dessus sur la femme, il doit être plus éduqué, plus riche ou plus âgé.
Pourtant, d’un point de vue extérieur, Tinder donne une image très progressiste : action droit des femmes, égalité salariale… Tout à fait en opposition par rapport aux entrailles de l’application.
Malgré tout, les femmes auront tendance à récolter des match (quand deux personnes se likent réciproquement) plus facilement que les hommes, ce qui va naturellement booster leur égo et les rendre d’autant plus addict à l’application. Selon une étude réalisée pour l’université d’Amsterdam, cet impact positif sur l’égo est la raison principale pour laquelle les femmes se connectent à Tinder. Quant aux hommes, ils sont plus dans l’espoir d’une rencontre sexuelle. On développe rapidement une accoutumance à Tinder qui fait qu’on se connecte régulièrement.
Natasha Dow Schüll a écrit un livre « Le design de la dépendance » et explique que Tinder s’est approprié les mêmes codes que le casino : la récompense aléatoire et variable. On sait qu’on va récolter parfois des matchs, parfois des messages, mais on ne sait jamais de qui.
Quelques jours avant la sortie du livre, Tinder a déclaré qu’ils avaient abandonné ce système de cotation appelé Elo Score, mais ont reconnu l’avoir utilisé.